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YANNICK BARDE

Qui êtes-vous ? Que faites-vous ?

Je suis un jeune vieux (ou un vieux jeune, c’est selon) de bientôt 44 ans, dans ce métier depuis une vingtaine d’années. Même si je n’ai pas attendu de travailler dans le tourisme pour voyager ! Et heureusement d’ailleurs, parce qu’entre la vision idéalisée que les gens ont parfois de notre job et la réalité de notre quotidien en entreprise, il y a un léger… décalage. J’ai souvent l’impression d’être plus « professeur Jones » qu’« Indiana ».

Mes parents ont longtemps été enseignants en Afrique, où j’ai passé une bonne partie de mon enfance : 2 ans en Côte d’Ivoire et surtout 11 ans à Madagascar. Puis il y a eu le retour en France à la fin du collège, le lycée à Marseille, l’internat et les études à Paris. Le tout ponctué de jolies vacances en famille, de colos et de séjours linguistiques, de stages divers, d’échanges scolaires et de quelques virées mémorables entre copains aux quatre coins du globe. Avant de partir en VIE au Qatar en 2003 et de rejoindre ASIA en 2005, en tant que Chef de Produit Inde & Moyen-Orient jusqu’en 2014 et comme Co-Directeur de la Production depuis.

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Au risque d’être trivial, ce qui me « fait lever le matin » c’est généralement… mon réveil ! Parce que j’ai tendance à me coucher tard et sans la matinale de France Inter ou les bonnes ondes de Oui FM pour me tirer du lit, j’ai un peu de mal à émerger ! Mais quand je n’ai pas besoin de déposer mon fils à l’école et de filer au bureau, je me lève volontiers en vacances pour une petite session de surf avec les copains ou pour prendre le premier télésiège après une grosse chute de neige. Pendant le confinement, j’adorais partir à l’aube pour marcher seul dans les rues désertes de Paris… tout dépend de l’endroit où je suis et de ce que j’ai à faire (ou pas).

ASIA est un TO à taille humaine, fondé par Jean-Paul Chantraine au milieu des années 80 et spécialiste « historique » du voyage sur mesure vers l’Asie-Pacifique, même si notre programmation s’est beaucoup étoffée depuis l’origine et décline désormais une large palette de circuits accompagnés sur une bonne quarantaine de pays, du Caucase à l’Océanie… et maintenant l’Afrique australe, avec notre nouvelle marque « Equatoriales ».

Nous travaillons avec les principaux réseaux de distribution en France et nous avons tissé au fil du temps des liens étroits avec plusieurs réceptifs et partenaires sur notre zone. En tant que « passeurs d’Asie », nous avons toujours cultivé une certaine idée du voyage, basée sur le respect, l’échange, l’authenticité… des valeurs humanistes chères à Jean-Paul. Il était l’une des grandes figures de la profession et qui s’est souvent engagé à destination, en soutenant matériellement des projets porteurs de sens ou à travers la conception et le financement de créations originales en Thaïlande, dans le Top End australien mais aussi au Laos et en Indonésie.

 

Que représente pour vous le tourisme responsable (en général) ?

Difficile de résumer en quelques mots un concept aussi riche et complexe. Le tourisme responsable est à la fois une philosophie voire une éthique du voyage, où la solidarité, le partage et l’ouverture d’esprit sont des valeurs cardinales. C’est une somme d’actions tangibles pour limiter les empreintes sur notre passage et préserver, autant que faire se peut, les fragiles équilibres sociaux, culturels ou naturels dans les pays qui nous accueillent.

C’est un formidable guide de conduite et de bonnes pratiques pour s’engager de manière plus précise, plus structurée et plus pérenne en faveur d’un tourisme vertueux. C’est aussi un « club » de confrères d’horizons divers, dont les conseils et les retours d’expérience sont toujours précieux… et avec qui on peut échanger librement, de façon sérieuse et amicale à la fois.

Le référentiel ATR me semble déjà très complet et exigeant. Il a aussi su évoluer avec son temps pour intégrer les enjeux auxquels notre secteur d’activité est de plus en plus confronté (comme les questions liées à la compensation carbone, au surtourisme ou à la gestion des déchets) et pour y répondre de manière concrète, rigoureuse et transparente.

Mais je fais confiance à Julien Buot et aux membres fondateurs de l’association pour aller encore plus loin et trouver de nouveaux terrains d’action ! Ils ont toujours été très en avance sur ces sujets et même si ce n’est pas évident de suivre leur rythme, sans eux le tourisme responsable ne serait encore qu’une belle mais vague promesse !

Comment agir pour un tourisme responsable ? 

Sous l’impulsion de Jean-Paul Chantraine, qui a toujours eu une affection particulière pour l’Indonésie, nous avons apporté notre soutien au village de Bebekan dans le Sud de Yogyakarta en 2006, suite au violent séisme qui avait frappé Java, à travers le financement des activités éducatives et culturelles du centre communautaire. Idem en 2010 dans le village de Kinarejo, après l’éruption du Merapi. Et depuis 2013 avec l’expérience Gunung Kawi à Bali, visant à soutenir l’école et les activités de ce village rural près d’Ubud, ou encore notre tentative de promotion du site oublié de Muara Jambi à Sumatra, en partenariat avec Elisabeth D. Inandiak et les habitants du village.

Chez ASIA, nous soutenons – directement ou indirectement – les initiatives en matière de redistribution, de formation des guides ou de protection de l’environnement lancées par certains de nos réceptifs (en Inde, en Thaïlande, au Cambodge, au Vietnam ou en Indonésie notamment). Nous sommes aussi fidèles aux destinations que nous programmons et à nos correspondants locaux, que nous accompagnons sur le long terme, même en période de crise. Nous nous efforçons, également, d’être transparents envers nos clients, nos équipes et nos partenaires, en faisant preuve d’écoute et d’honnêteté à leur égard… et surtout d’humilité, car nous ne serons jamais parfaits !

Quant à moi, je fais ce que je peux, à mon modeste niveau. Je fais de plus en plus attention à ce que j’achète, à ce que je jette, j’essaye d’être beaucoup plus sobre, y compris dans mes déplacements au quotidien et en vacances… mais j’ai bien conscience de « l’ombre climatique » de mon métier et du fait que je suis encore loin, très loin du compte au niveau de mon empreinte carbone personnelle.

Franchement, je suis bien incapable de faire un quelconque pronostic sur les mois et les années qui nous attendent ! Sans être Houellebecquien et penser que le monde d’après sera « le même, en un peu pire », je ne partage pas vraiment l’idée d’un grand soir, que nous vivons « l’année zéro » du tourisme et que rien ne sera plus jamais comme avant. Les vieilles habitudes ont la vie dure et une fois la crise passée, je ne serais pas totalement surpris que l’on retombe assez vite dans certains travers. Tout dépendra bien sûr de la durée de la crise et de son impact, sur un plan sanitaire mais aussi économique. Et puis nous avons tous des biais cognitifs et une lecture européocentrée des choses qui a ses limites. Un millennial français bien né n’a pas la même conception des vacances et des loisirs qu’un couple de retraités de la classe moyenne en Chine… quelle que soit la nouvelle normalité avec laquelle nous devrons composer.

D’après-vous, quelles vont être les conséquences du Covid 19 ? Sur la profession ? Sur le monde du tourisme et des TO ?

Je ne crois pas que cette crise remette tout à plat… en tout cas pas partout et certainement pas de la même manière. Il y a tellement de motivations différentes au voyage. Le tourisme fait pleinement partie de nos vies. Nous sommes tellement inégaux face au risque et en termes de capital culturel, social ou économique. Cela dit, je suis convaincu qu’elle aura des effets. Forcément. Et qu’elle accentuera sans doute plusieurs tendances (parfois contradictoires) que l’on observait déjà : la recherche d’un tourisme plus qualitatif, plus sobre et plus humain ; une certaine forme non pas de repli mais de relocalisation, à la fois géographique (sur son pays, sa région) et sentimentale (sur sa famille, sa sphère privée) ; un souci accru de réduire les externalités négatives du voyage, notamment sur le plan environnemental ; l’envie de partir peut-être moins souvent mais plus longtemps (pour ceux qui peuvent se le permettre) et à contre-courant, pour éviter les foules en haute saison, s’écarter des lieux les plus fréquentés (voire saturés), joindre l’utile à l’agréable, etc.

Malgré toutes les incertitudes qui règnent, il va bien falloir tenir compte de ces signaux faibles et de ces changements à l’œuvre pour nous remettre en question et nous adapter, chacun à notre niveau. Cette crise nous permettra de répondre au mieux aux attentes qui émergent et se précisent : le besoin d’être rassuré, à travers des conseils et des services personnalisés ; la recherche d’une certaine forme de flexibilité et de liberté pendant son séjour ; la préférence pour les petits groupes ou la découverte entre soi ; le goût réaffirmé pour les grands espaces et les expériences rares ; l’attachement au « génie d’un lieu » et à tout ce qui donne un supplément d’âme au voyage ; l’importance des outils numériques, avant le départ et sur place… Désolé pour cet inventaire à la Prévert. Comme beaucoup, j’aimerais bien avoir une boule de cristal !

Le voyage et vous

Quel est votre meilleur souvenir de voyage ? (Une émotion, une sensation, une rencontre ?)

Une odeur : celle du frangipanier et de la vanille… qui me rappellera toujours mon enfance à Madagascar.

Plus qu’une musique, un bruit, un vacarme… celui du trafic à Delhi la première fois où j’ai débarqué en Inde !

Une rencontre : Fadi, Osama et Lana… le guide et la petite équipe de notre réceptif en Syrie, qui m’ont accompagné lors de mon repérage sur place en 2009, deux ans avant que le pays bascule dans une guerre atroce et sans fin. Je repense souvent à ce voyage, qui ne sera plus jamais le même. À ce pays magnifique mais complètement dévasté. Et à ces trois personnes en particulier, qui m’ont accueilli les bras ouverts et avec qui j’ai partagé tant de bons moments. Avec le temps, je n’ai plus reçu de nouvelles… et je ne peux pas m’empêcher d’éprouver une certaine culpabilité. Le sentiment de les avoir abandonnés. Sans savoir où ils sont, ni ce qu’ils sont devenus.

Quel est votre voyage de vos rêves ou votre prochain voyage ?

Si je pouvais, j’adorerais partir plusieurs mois pour relier tous les endroits qui me font fantasmer : de Socotra au Kamchatka, de l’archipel des Quirimbas aux îles Mentawai, de la Jamaïque à l’Ethiopie sur les traces du mouvement rasta, en van de San Francisco à Los Cabos ou sur la route du Blues de Chicago à la Nouvelle-Orléans. Mais pour ça, il faudrait que je me (re)découvre une âme d’aventurier et accessoirement… que je gagne au Loto.  Donc en attendant, je me contenterai sans problème des vagues de Guéthary ou des pistes des 3 Vallées.

Ma photo de voyage : Vacances en famille, Front de mer de Gallipoli dans les Pouilles, au Sud de l'Italie - Été 2015

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